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Difficultés et conditions de la communication dans un système organisationnel : illustration avec l’aviation civile
A chaque instant, un pilote de ligne prend conscience de tous les éléments du contexte de son travail, par tous ses sens et à travers toute son expérience incorporée ; ce faisant, il met en œuvre une pensée vivante pour actualiser le sens de sa mission. Il s’aide de systèmes très sophistiqués qui déroulent un programme stéréotypé, dans l’ignorance de l’intention réelle du pilote. Au-delà de l’aviation civile, pour tous les opérateurs travaillant avec des machines, cette absence de sens partagé est un problème, elle met en évidence qu’entre un homme et un système artéfactuel, il ne peut y avoir de communication. L’analyse des systèmes organisationnels montre que leur fondement théorique est une réduction trop simpliste de la réalité, basée sur une distinction insuffisante entre les hommes et les machines. Dans le monde technoscientifique, un néo-taylorisme sépare l’exercice de l’intelligence – conception et organisation – et la réalisation des objectifs ; les opérateurs sont alors programmables comme des machines, par des textes référentiels. Dans la temporalité opérationnelle, il n’y a pratiquement pas de place pour la communication entre le niveau de l’organisation et celui de «l’exécution». Hors champ opérationnel, la seule possibilité de communication est bien de relier la pensée vivante des opérateurs au programme organisationnel, mais la liaison ne peut se faire directement, à l’intérieur du paradigme actuel. Les deux parties doivent d’abord converger vers une compréhension de l’activité, en dégageant de nouveaux concepts avec l’aide des spécialistes des sciences humaines.