Les lanceurs d’alerte : émergence d’une problématique pour l’ergonomie

Le monde industriel et technologique a connu depuis des années des succès indéniables en matière de sécurité et de fiabilité. Mais la survenue de catastrophes majeures et d’accidents dramatiques continue jusqu’à nos jours de produire d’importante perte humaine et matérielle et de menacer l’environnement par des pollutions de grande envergure. Ces catastrophes et accidents étaient-ils prévisibles et évitables ? Pouvait-on anticiper leur survenue par une détection de signaux de dangers potentiels ?… De manières troublantes, des analyses rétrospectives de plusieurs événements ont montré que des alertes sur des défaillances en matière de sécurité ont été lancées bien avant la survenue de la catastrophe ou de l’accident en question. Ce constat appelle plusieurs interrogations que l’analyse ergonomique cherche à instruire dans cette communication : pourquoi le lanceur d’alerte est souvent non écouté voire menacé ou tout simplement ignoré ? Pourquoi l’alerte est-elle considérée comme un « mauvais présage » et non comme une ressource essentielle à la sécurité ?…Le lanceur d’alerte se satisfait-il de son alerte ou met-il en place des stratégies individuelles et/ou collectives pour se faire entendre ? Quelles sont les conditions managériales et organisationnelles en capacité de développer le pouvoir d’agir des lanceurs d’alerte ? Sur la base de deux études de cas, nous chercherons à caractériser l’activité de deux lanceurs d’alerte afin de proposer des réponses aux différentes questions et d’y apporter un premier niveau d’analyse et d’explication par la proposition et la définition de deux nouvelles notions : la résilience opérative et la résilience stratégique des lanceurs d’alerte.